Récemment, une amie polyglotte, me faisait remarquer qu’à sa connaissance l’expression « bon courage » n’existe qu’en français. En contrepartie, elle notait que cette quasi exclusivité hexagonale était largement compensée par le nombre considérable de « bon courage » que nous utilisons chez nous, notamment dans le cadre du travail.
D’après le dictionnaire, « courage » signifie « une force morale, le fait d’agir malgré les difficultés, une énergie dans l’action », mais aussi « le fait de ne pas avoir peur ». On pourrait en déduire que « bon courage » au travail se limite à des métiers dangereux ou à risques, et donc aux Tom Cruise des 35 heures. Or « bon courage », c’est pour tout le monde, y compris pour des professions qui ne semblent pas, a priori, comporter des périls particuliers, même si chaque travail est un défi permanent et que certains postes censés ne pas être « dangereux » se heurtent à des assauts d’incivilités et d’agressivité de plus en plus fréquents. Dans ce cas, « bonne chance » pourrait remplacer « bon courage », ou s’y ajouter.
Il est vrai aussi qu’à partir du moment où il faut respecter des consignes, appliquer un règlement, obéir aux ordres d’un chef (grand ou petit), faire marcher sa propre boîte, c’est « bon courage » à tous les étages, même pour les chefs (grands ou petits) qui eux aussi sont soumis à des contraintes. « Bon courage » également à ceux qui s’ennuient à leur poste et qui peuvent somatiser jusqu’à la porte de la médecine du travail. Danger de burn out
pour les uns, « bore out
» pour les autres, est-ce vraiment la faute d’un manque de courage ?
En période de rentrée, « bon courage » est toujours à la fête avec la reprise du boulot. De fait, il en faut du courage à tous ceux qui, en leur for intérieur, ne sont pas heureux de retrouver les collègues, et, employons les grands mots, d’utiliser leurs compétences et talents, ou plus simplement d’avoir un job où tout n’est pas forcément motivant, mais, ils doivent bien se résoudre. Comme disent les Américains, « un job est un job ».
A propos des Américains, comment font-ils, eux ? « Good courage » ? Non, ça n’existe pas. Ce sera : « good luck ! hope it goes well !
», qui, d’ailleurs, est proposé comme traduction de « bon courage », ce qui assimile du même coup courage et chance, et nous ramène à ce qui était proposé plus haut. Il y aurait aussi cette expression tellement répandue outre Atlantique où tout doit donner lieu à sourire et divertissement, même le hamburger Mc Do : « Enjoy it !
». Mais bon, faut pas exagérer, nous sommes en France, où « profiter » est réservé au temps libre. Alors, pour ceux qui voudraient faire genre en se la jouant cool version States, il y a l’inévitable mais tellement adapté en la circonstance : « take care
», soit en interprétation libre : « Fais gaffe quand même ».